Ayumi SUGIYAMA, la pâtisserie est le sel de la vie

Ayumi SUGIYAMA (©FlorianDomergue)

Peu probable que vous déceliez une once d’humeur maussade chez Ayumi. Elle sourit et rit tout le temps. Ce n’est pas un affichage factice ou forcé, c’est le reflet de sa conviction de vie. D’ailleurs, si elle a décidé à 17 ans d’être pâtissière, c’est pour apporter de la joie dans celle des autres. Ayumi est originaire de Shizuoka, une ville d’environ 700 000 habitants, sur la côte est de l’île principale du Japon. Elle est allée à l’école Tsuji à Tokyo, section pâtisserie avant de débuter dans une boutique de sa ville natale. Depuis sa première expérience en France en 2003, elle n’a presque jamais quitté l’Hexagone, officiant en qualité de cheffe pâtissière en restauration. En 2016, elle a ouvert son propre établissement à Paris, Accents Table Bourse, avec son compagnon Romain Mahi. Grâce à la conjugaison de leurs talents, ils ont décroché une étoile au guide Michelin en 2019. Accents Table Bourse est joli, frais, aéré, chaleureux. La cuisine est subtile, douce, joviale. Rencontre avec la cheffe pâtissière-propriétaire Ayumi Sugiyama. 

[Pour faire connaissance avec Marina MENINI : ici]

Quelle(s) sont les spécialité(s) œno-gastronomiques de votre région d’origine ?

Le thé vert (ndlr : Shizuoka est la 1re région productrice de thé au Japon), l’anguille, la mandarine, le wasabi…et bien d’autres. La région située entre mer et montagne regorge de ressources naturelles. 

En France, pour retrouver ces spécialités, je prends le thé chez Jugetsudo (95 rue de Seine, Pari 6). Je n’y suis jamais allée, mais je sais que le restaurant Nodaïwa est spécialisé dans la cuisine japonaise de l’anguille. J’adore la brochette de foie d’anguille ! C’est un peu amer…

Votre prénom a-t-il une signification ? 

Ayumi signifie « progresser », m’a dit ma mère.

Trouve-t-on des influences japonaises dans vos créations ?

Parfois… Avant d’avoir mon propre restaurant, je n’utilisais jamais d’ingrédients japonais pour ne pas être stigmatisée en tant que Japonaise.

Pourquoi la pâtisserie ?

A 5 ans, j’avais déjà décidé d’être pâtissière ou boulangère. À 17 ans, j’ai eu la chance de faire un stage chez un boulanger que mon père connaissait. Je voyais que les clients n’étaient pas souriants. Le pain est un aliment utile. Alors que dans une pâtisserie, les clients ont le sourire, ils sont joyeux. Le gâteau est là pour fêter un événement heureux, on l’apporte pour l’offrir, comme un cadeau. La pâtisserie, c’est le plaisir, la joie.

Pourquoi la pâtisserie française ?

Au Japon, il y a la pâtisserie japonaise et la pâtisserie européenne. Je n’aimais pas le haricot rouge sucré, ni vraiment le sucré en général d’ailleurs, alors j’ai opté pour la pâtisserie française.

Pourquoi la pâtisserie française en France ?

La France était une évidence, aller à la source découvrir les produits. La première fois, c’était à Paris en 2003, à cette époque, mon frère étudiait l’architecture à Florence en Italie, c’était rassurant de le savoir à proximité. 

©CaroleGayet

Votre plat préféré de la cuisine japonaise ? 

Les ramen ! Mais pas forcément les ramen de restaurant, j’aime aussi les ramen instantanées !

Enfant, j’ai habité avec mes grands-parents, et mon grand-père était très très très amateur de ramen. À tel point que lorsqu’ils ont voyagé à Paris, ils sont allés manger des ramen à deux reprises !  

À Paris, celles que je préfère sont chez Ippudo.

Au Japon, je mange des ramen à la maison, au restaurant.

Une référence culturelle japonaise en France ?

Chiaki Kokami. C’est une artiste japonaise qui vit en France. Elle a peint les tableaux qu’on peut voir dans le restaurant, elle a aussi réalisé le décor dans les toilettes. Elle est fleuriste, mais avec beaucoup d’autres talents, par exemple elle crée des céramiques, comme moi. Elle est très importante pour moi parce qu’elle stimule ma propre créativité. C’est une personne très ouverte. J’aime les gens créatifs, qui ont de l’imagination.

Une référence culturelle au Japon ? 

Les humoristes japonais. Au Japon, c’est une tradition de débuter l’année en rigolant. Chaque fois que je vais au Japon, je vais assister à un spectacle d’humoristes. S’amuser est très important aussi dans ma vie. Dans la journée, au travail, j’essaye toujours de rigoler. On ne vit qu’une fois. C’est aussi pour ça que j’ai choisi la pâtisserie, pour son côté festif et joyeux.

Appréciez-vous la cuisine italienne ?

Je l’adore et j’aime aller en Italie ! La cuisine italienne est indissociable d’une ambiance joyeuse.

Mais je ne retrouve pas en France la cuisine que j’apprécie en Italie.

Lorsque je suis allée à Florence, j’ai pris goût à la zuppa, au sandwich aux tripes (ndlr : lampredotto), j’aime les spaghetti, à Naples la pizza très fine…

En Italie, les produits sont bons : la tomate, le citron, l’olive…

Au Japon, j’ai travaillé dans un restaurant italien, à Shizuoka, le chef était japonais, il faisait la foccacia maison, proposait l’affogato (boule de glace douché d’un espresso) en fin de repas, il y avait aussi des crostini de foie de lapin, il préparait les orecchiette maison.

A la maison, je cuisine parfois à peu près italien !

Votre dessert italien préféré ?

J’aime le tiramisu, mais en Italie il est différent de celui qu’on trouve au Japon, j’en ai mangé un à Rome qui était particulièrement alcoolisé ! 

Je réalise un dessert « façon » tiramisu, avec des ingrédients plus légers que la version originale.

Les mots de la fin ?

La pâtisserie arrive à la fin du repas car « tout est bien qui finit bien ». Même si on traverse des périodes difficiles, rigoler apporte toujours de la légèreté.

Ayumi SUGIYAMA et Romain MAHI (©FlorianDomergue)

Accents

24 rue Feydeau

75002 Paris

https://accents-restaurant.com/

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